Les maladies inflammatoires n’ont pas toutes les mêmes caractéristiques biologiques, certaines ont une composante auto-immune et d’autres une composante auto-inflammatoire, certaines sont monogéniques et d’autres polygéniques. Le Professeur Bernard COMBE, rhumatologue au département de rhumatologie à l’hôpital Lapeyronie, à Montpellier, nous permet d’y voir plus clair et de comprendre ce qui les différencie. LES MALADIES INFLAMMATOIRES PEUVENT AVOIR UNE COMPOSANTE AUTO-IMMUNE OU AUTO-INFLAMMATOIRE.POUVEZ-VOUS REVENIR SUR CES NOTIONS ? Les maladies à composante auto-immune classiques comme la polyarthrite rhumatoïde (PR), le diabète, le lupus, ou les vascularités par exemple, sont des maladies polygéniques, c’est à dire qu’elles résultent d’une prédisposition génétique impliquant un ensemble de gènes et non un seul. Leur caractère auto-immun relève de la présence d’auto-anticorps. Dans la PR, il s’agit du facteur rhumatoïde, des ACPA (anticorps anti-peptides citrullinés) ou des anti-CCP (anti-peptides cycliques citrullinés), pour le lupus, des anticorps anti-nucléaires et des anti-ADN (anti-acide désoxyribonucléique), et pour les vascularites, ce sont les ANCA (anticytoplasme des polynucléaires). Ces auto-anticorps traduisent une réponse auto-immune du système immunitaire et leur mise en évidence est utile à la fois au diagnostic et à la compréhension du mécanisme de la maladie. Ce sont donc des maladies inflammatoires pour lesquelles il y a une composante auto-immune bien identifiée. A l’opposé, nous avons des maladies inflammatoires pour lesquelles nous n’avons jamais mis en évidence de réaction auto-immune et donc sans anto-anticorps. Ces pathologies sont dites à composante plutôt autoinflammatoire, il s’agit des spondyloarthrites, de la maladie de Crohn, des uvéites ou du rhumatisme psoriasique par exemple. QUELLE EST L’IMPLICATION DU SYSTEME IMMUNITAIRE DANS CES DEUX CAS ? Dans les 2 cas, le système immunitaire est impliqué, mais dans les maladies à composante auto-immune, c’est plutôt l’immunité acquise qui est en jeu, le système immunitaire va réagir contre des composants du soi. Dans les maladies auto-inflammatoires, c’est plutôt l’immunité innée qui est en cause. Il y a une réaction inflammatoire résultant d’un dérèglement du système immunitaire, mais qui n’est pas du même ordre que pour les maladies auto-immunes. DANS NOTRE SUPPLEMENT RECHERCHE DE 2013, NOUS PARLIONS D’UN CONTINUUM DES MALADIES INFLAMMATOIRES QUI CLASSAIT CES PATHOLOGIES EN FONCTION DE LEUR COMPOSANTE AUTO-IMMUNE OU AUTO-INFLAMMATOIRE. EST- CE TOUJOURS D’ACTUALITE ET CETTE CLASSIFICATION NOUS DONNE-T-ELLE DES INDICATIONS SUR LA PRISE EN CHARGE DES PATIENTS ? En ce qui concerne, je trouve ce concept artificiel. Mais si on veut vraiment parler de continuum, on peut partir des maladies auto-inflammatoires monogéniques, qui sont des maladies rares. Parmi elles, le syndrome de Blau, les Caps (syndromes périodiques associés à la cryopyrine) ou la fièvre méditerranéenne familiale. Ces pathologies résultent d’une anomalie sur un gène d’une cytokine qui a muté par exemple. A l’autre extrémité, il y a les maladies typiquement auto-immunes, qui peuvent être monogéniques, mais c’est exceptionnel. Entre les deux, on trouve d’une part les maladies inflammatoires polygéniques comme la spondyloarthrite ou la maladie de Crohn et d’autre part les maladies auto-immunes polygéniques comme le lupus, le Gougerot-Sjögren, le diabète et l’arthrite rhumatoïde. Pourtant, si la spondyloarthrite n’a pas de composante auto-immune, dans les faits, l’inflammation est du même ordre que celle que l’on retrouve dans la PR, qui, elle, est classée dans les maladies auto-immunes. Il peut y avoir un continuum, mais c’est théorique. Celui-ci ne nous est d’aucune aide pour le diagnostic ni pour la prise en charge du patient. Ceci se confirme sur le plan thérapeutique, nous disposons de traitements qui vont aussi bien agir dans les maladies inflammatoires pures que dans certaines maladies auto-immunes. C’est le cas pour les anti-TNF qui sont efficaces dans les maladies inflammatoires comme la maladie de Crohn, la rectocolite ou les spondyloarthrites, mais aussi dans les maladies auto-immunes comme la polyarthrite rhumatoïde. En revanche, ils ne sont pas efficaces dans le lupus, alors que c’est une maladie auto-immune, et pas dans la goutte qui est une maladie inflammatoire pure. Magazine : POLYARTHRITE Info, MARS 2016
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