Je m’appelle Marie, j’ai 36 ans, j’habite un petit village en plaine des Vosges.
J’ai le lupus depuis que j’ai 15 ans ; au début, ce dernier était plutôt timide, je n’avais qu’un symptôme au niveau du sang (nombre très bas de plaquettes) : en l’espace d’une année avec un traitement par cortisone, tout est rentré dans l’ordre. Puis, à l’âge de 25 ans, j’ai commencé à avoir quelques tâches sur la peau, des douleurs articulaires et musculaires limitant petit à petit mes activités, j’ai dû prendre quelques arrêts de travail : la cortisone permettait de calmer les crises. Au début, je pouvais cacher le lupus, un peu de maquillage et le tour était joué (mes tâches étaient dissimulées sous le fond de teint). A cet âge-là, je suis également « tombée » enceinte, quelle joie !
Je ne pensais pas que cela puisse fonctionner sur moi, mais j’ai fait une fausse couche à quelques mois ; à la suite de cette dernière, les symptômes du lupus sont devenus plus importants. Ces 10 dernières années, les symptômes se faisaient de plus en plus nombreux et douloureux (des taches rouges vives sur le visage, le buste et les bras, des lésions aux doigts, aux orteils, aux talons des pieds, au visage, sur les bras ; des douleurs articulaires et musculaires, des œdèmes au réveil). Je me souviens qu’un matin, les douleurs articulaires étaient telles que je n’ai pas réussi à me lever pour me rendre aux toilettes. La peau s’ouvrait toute seule, elle suintait, parfois j’avais même l’impression que l’on avait passé un coup de chalumeau aux endroits qui me faisaient souffrir ; les yeux par moments me brûlaient m’empêchant de dormir.
Durant ces années, j’ai essayé une multitude de traitements (Plaquenil, Imurel, Disulone, Nivaquine, photophérèse, Revlimid, Belilumab, Thalidomid, Méthotrexate, Isotretinoïne, Colchicine, Sterala, Alitrétinoïne, Cellcept, IL-2 Proleukine, Cellules souches mésenchymateuses, Endoxan, Corticoïdes) pensant que ces derniers allaient calmer les symptômes (j’espérais pouvoir trouver enfin un traitement qui permettrait à la maladie de se mettre en sommeil et de me laisser un peu tranquille) mais malgré ces tentatives, les reins, les poumons, la peau, les yeux se sont détériorés à une vitesse fulgurante. Par ailleurs, ces traitements m’ont également apporté leurs lots d’effets secondaires : allergies au traitements, zona, infections régulières (dont 2 pneumonies avec hospitalisation en réanimation, dont une a nécessité un coma artificiel).
Heureusement, j’ai toujours eu le soutien de mon mari, ma famille, mes amis, mon employeur. A partir de décembre 2021, mon état s’est fortement dégradé, j’ai fait plusieurs détresses respiratoires et au fur et à mesure des mois, je perdais de la capacité respiratoire m’obligeant à avoir l’oxygène toutes les nuits, et même 24 heures sur 24 sur certaines périodes. Je devais me rendre à l’évidence, malgré toutes les tentatives de traitements effectuées, ce foutu lupus prenait le dessus et allait bien finir par m’achever : je craignais la souffrance d’une mort en détresse respiratoire ; mon seul souhait, lorsque je me suis rendu compte que je n’avais plus de solutions était tout simplement de mourir sans souffrance (c’était ma seule imploration : éviter la souffrance). A l’automne 2022, en « tombant » sur un article dans la presse (Santé magazine), j’ai lu qu’en Allemagne, près de Nuremberg, des Professeurs avaient soigné 5 patients atteints de lupus et que tous ceux-ci ne présentaient plus aucuns symptômes.
A cette lecture, j’ai partagé cet article avec les équipes médicales qui me suivaient (et me suivent encore). J’avoue que cette découverte représentait un énorme espoir. Après discussions ; aussi (je l’avoue) persévérance et ténacité de ma part envers les équipes médicales, et grâce à ces dernières, françaises et allemandes, j’ai pu bénéficier de cette thérapie en février-mars dernier.
Aujourd’hui, cela fait un an que j’ai eu la thérapie par CAR-T cells : et l’évolution a été folle : je me sens mieux qu’auparavant, je n’ai plus aucune douleur aux doigts et pieds et je ne prends plus d’oxygène (ni le jour, ni la nuit).
Je peux faire des choses qui m’étaient impossibles auparavant : je peux utiliser mes mains normalement, j’arrive à prendre ma douche debout, je réussis à faire du vélo électrique, marcher, je me suis remise également à la musique, je peux cuisiner sans douleur et peux désormais mettre des chaussures ; j’arrive à aller de mes WC à ma cuisine sans être essoufflée, j’arrive à marcher plusieurs kilomètres, je n’ai plus peur de ma respiration et ne réfléchis plus pour respirer. Je redécouvre ce qu’est la vie sans douleur : c’est fantastique !!! Après plus de deux années d’arrêt total de mon travail, j’ai pu reprendre mon activité professionnelle à temps partiel : retrouver une place dans le monde du travail était pour moi inespéré. Il y a quelques semaines, en allant faire du tourisme à Prague, j’ai même pu marcher presque 9 kilomètres sur une journée : cela représente pour moi un effort auquel je ne pouvais pas imaginer, ni même espérer auparavant. Je me souviens, lorsque que ma respiration a commencé à s’améliorer et que j’ai commencé à ne plus avoir besoin de réfléchir pour respirer, je me suis laissée surprendre : une chose m’a fait rire et j’ai ri, j’ai ri, j’ai ri à en pleurer sans même prêter attention à mon souffle : à ce moment-là, je ne me rappelais même plus la dernière fois que j’avais pu rire avec tous les muscles de mon corps (plusieurs années sans doute). Aujourd’hui, je reste essoufflée (mais nullement comparable à avant) et je ressens également moins de fatigue ; lorsque je me réveille le matin, je sens que mon corps s’est reposé. Je n’ai également plus de protéines dans les urines (ce qui est bon signe pour mes reins).
Je peux désormais faire des projets dans ma vie. Je ne prends plus de traitements spécifiques au lupus comme le plaquenil, la cortisone, des immunosuppresseurs. Je continue les perfusions d’immunoglobulines et la kinésithérapie deux fois par semaine. Afin d’entrainer au mieux mes poumons et d’adapter mon corps à l’effort, je fais régulièrement une activité physique (marche, rameur, musculation et/ou vélo électrique). Je ne sais comment remercier tous mes proches et leur montrer ma reconnaissance : ils m’ont accompagné sans faille et sans relâche à chaque épreuve et me soutiennent encore. Même s’il est parfois difficile de s’exprimer sur ses propres sentiments, je voudrais leur dire simplement : merci, merci, merci, merci, JE VOUS AIME !
Je remercie également, sincèrement et chaleureusement, l’équipe du CRMR MATHEC (Centre de Référence des Maladies auto-immunes systémiques Rares – Maladies Auto-immunes et Thérapies Cellulaire) à l’hôpital Saint-Louis qui m’ont permis de bénéficier de la thérapie par CAR-T Cells en Allemagne. Sans eux, je pense sincèrement que je n’aurai pas pu en bénéficier.
Je remercie aussi, sincèrement et chaleureusement, Professeur Schett, Professeur Mackensen et Docteur Müller qui ont accepté de me soigner, et également toutes les équipes médicales allemandes qui ont fait preuve d’une grande bienveillance malgré la barrière de la langue.
J’en suis certaine, cette thérapie m’a sauvée la vie !